120 battements par minute
J’ai eu la chance d’assister à l’avant première de « 120 battements par minute ». Ce film a été financé en partie par la Région Centre-val de Loire et tourné partiellement à Orléans dans l’ancien Hôpital de La Source récemment désaffecté.
Robin Campillo, le réalisateur nous avait prévenu : « ce film est long, 2h 20 , j’en suis entièrement responsable car c’est moi aussi le monteur, alors si vous vous endormez n’hésitez pas à me tweeter votre ennui. » Quelle fausse modestie pour un cinéaste dont le film a obtenu le Grand Prix du dernier Festival de Cannes et le prix du Jury au Festival du film Romantique de Cabourg. Ce film m’a passionné du début à la fin sans moment de répit tant son rythme, 120 battements par minute est soutenu .
Pourquoi j’ai aimé ce film ?
Une histoire de révoltés qui agissent
Pour moi un sous titre irai très bien : la révolte des malades du sida. « Nous voulons vivre, nous refusons de crever dans l’indifférence générale » . Ce slogan est d’actualité encore et pourrait être aussi celui des malades du cancer et de leur famille, la recherche et surtout la prévention avançant trop doucement .
Ce film nous met en immersion 2h 20 dans l’univers d’une minorité
Nous les hétérosexuels que connaissons nous des homos garçons ou filles en dehors de clichés vulgaires. Le mariage pour tous a vulgarise un peu plus, jetant souvent l’anathème sur ces personnes différentes et trop souvent
Ce film nous plonge dans l’intimité de ces hommes et ses femmes. Plusieurs scènes nous permettent d’entrevoir leurs plaisirs de trentenaires et malheureusement trop souvent leurs souffrances . La seule scène de sexe nous décrit un corps à corps rempli d’affection et de douceur loin des clichés et des fantasmes. Je regrette le manque des scènes de vie au travail ou avec les familles mais l’objet du film n’était pas la vie des homos. Nous ressentons l’environnement d’indifférence qu’ils subissent quotidiennement comme beaucoup de minorités, même au sein de leur communauté . Je revois le dialogue musclé entre colleurs d’affiche de slogans et des passants homos « laissez nous tranquilles ». Toutes les valeurs humaines de générosité, de solidarité sont concentrés dans ce film.
Une leçon de démocratie
Les assemblées générales d’Act Up Paris m’ont passionné; soucis d’accueillir les nouveaux, de donner et respecter la parole de chacun même d’une mère qui pourrait être considérée comme ringarde, d’abolir les applaudissements. Le débat sur la dialectique entre les extrémistes et les négociateurs est remarquable . Le partage des responsabilités entre les animateurs avec un chef charismatique , l’écoute des arguments, les différences de conception de la situation selon le vécu, ici le niveau de la maladie et des résultats sanguins, tout cela est très actuel.
Des belles images
Le microscope montre des images du virus presque poétiques.
Les scènes de boîtes de nuit à 120 battements par minute, moyen indispensable pour vivre, de se rencontrer et de s’aimer quand on a 30 ans, sont filmées comme des feux d’artifice.
Le fleuve rougeoie de colère quand la souffrance fait rage.
Des acteurs ultrasensibles
On aurait pensé à un documentaire tant le jeu des acteurs semble vrai . Quel travail pour se mettre dans la peau des personnages ! Quelle recherche documentaire pour aborder un sujet victime de l’indifférence des spécialistes, des documentaristes, des médias.
Ce film sort en salle le 23 août 2017, il faut aller le voir absolument. Je rêve que les jeunes puissent le voir, que les professeurs y emmènent leurs élèves et en discutent avec eux. Quel moyen important de prévention contre l’épidémie qui sévit encore trop. Et puis quel leçon de tolérance, cette vertu si indispensable.